Membrane de sécurité et de fonctionnement BdP
A Brin de Paille, rien n’est plus important que le soin à l’humain, c’est le cœur de la permaculture, y compris si cela doit mener à la dissolution de l’association. S’autoriser à penser les relations que l’on a et que l’on veut avoir avec les autres est central dans une vie humaine, mais c’est aussi un privilège. C’est un exercice quasi indispensable pour le fonctionnement collectif (familles, amis, collègues, lieu de vie, etc.). Cela fait passer par des phases qui ne sont pas faciles/confortables à court terme, mais le résultat lui est appréciable à long terme. Pourquoi attendre une crise pour s’y confronter et non pas remettre en question la sincérité de nos relations ?
Sincérité des relations et des échanges :
- L’hypocrisie tue les collectifs (un collectif étant formé à partir de 2 personnes) ; l’hypocrisie est moins coûteuse à court terme en temps et en énergie ; la sincérité est plus coûteuse mais donne des fruits à long terme.
- Selon l’importance du collectif dans la vie de chacune, la sincérité n’est pas de même intensité. Ainsi, si BdP représente 1 ou 2h par semaine de votre vie, il n’est pas nécessaire d’en attendre la même intensité que dans une relation quotidienne. Toutefois, tout dépend aussi de l’implication émotionnelle. Dès lors que celle-ci devient importante, peu importe la raison, il est bon de la partager et pour les autres, de la recevoir.
- Il y a au moins 10 façons de ne pas se comprendre et c’est souvent le point de départ de la discussion : identifier ce sur quoi on n’est pas d’accord, c’est-à-dire les différences de représentation du monde.
Droit à l’image :
- Apparaître ou non sur les photos
- A usage privé ou à usage réseaux sociaux
Parole :
- Parler c’est manipuler
- On n’est pas obligé de parler
- On fait attention à ce que tout le monde ait parlé avant de reprendre la parole
- Toute parole est bonne significative
- Toute émotion est réelle, l’interprétation qui en découle, pas forcément
- Peu importe le pronom utilisé, toute personne ne s’exprime jamais qu’en son nom
- On peut prêter attention à son volume sonore et on accepte de considérer la question si l’on nous demande de l’adapter
D’où parle-t-on ? La neutralité n’existe pas, la neutralité consiste à indiquer d’où l’on parle
- Identifier d’où l’on parle c’est-à-dire d’où l’on vient socialement, ses privilèges, ses croyances et idéologies,...
- On prend soin de ne pas asséner ses croyances et idéologies comme des vérités ou au moins de replacer ce que l’on dit dans un contexte idéologique
- Une personne qui parle, ne donne jamais que son point de vue, même quand elle dit on, nous, je ou peu importe la forme
Le fond doit primer sur la forme :
- Non pas qu’il faille faire aucun effort sur la forme mais celle-ci est de très loin minoritaire. Contrairement à une idée en vogue qui vise à nier une partie du réel, il n’existe pas de communication bienveillante ou malveillante. Concrètement, on peut dire et faire des choses très dommageables pour les autres avec un ton doux, un sourire et une forme convenue… Et des choses qui améliorent la vie collective avec un ton sec et un air froid. Tenter d’encadrer les échanges dans une approche essentiellement de forme, c’est déjà s’engager sur la voie de la domination. Une catégorie de la population s’arroge la prérogative de définir quels sont les bons codes sociaux et discriminer voire exclure a priori toustes celleux qui n’auraient pas les bons codes ou moins aptes à maîtriser la bonne forme, forme qui aura en plus tendance à devenir stricte et figée et servir de prétexte à la censure (ex : l’orthographe, les gros mots, le registre, l’accent, parler en “je”,...). Ces manières sont une forme renouvelée des “bonnes manières”. L’approche alternative consiste à comprendre qu’une personne ne parle jamais qu’en son nom, peu importe la forme utilisée. Cette méthode est beaucoup plus économe en énergie individuelle et collective pour un résultat meilleur. La sincérité des échanges est possible.
- La colère, la frustration, l’agacement … sont des réactions et des émotions humaines qu’on accepte. Leur expression n’est pas dans le but de nuire ou “de régler des comptes”.
Eléments basiques de sociologie :
- Tout être humain fait de la politique dès lors qu’iel est en interaction avec au moins un autre être et souvent même tout seul. La politique étant définie par la praxis (va et vient entre des théories, des idées et la pratique) permanente qui consiste à se demander quels types de relations je souhaite avoir avec les autres.
- Tous les humains sont imparfaits. Ça ne sert à rien d’attendre ça des personnes qui vivent autour de nous. Les humains font des erreurs et c’est ok. Et même plus, quand une personne fait une erreur les autres ont une part de responsabilité même si ces personnes ne se connaissent pas ou se côtoient peu. Les réussites comme les erreurs sont un processus social collectif impliquant toute la société. Si je vole, c’est que j’ai besoin de quelque chose. Et si c’est par envie, ce sont les valeurs de la société et les inégalités qui me poussent à envier.
- Tout n’est pas beau dans le meilleur des mondes. Certaines personnes se sentent mal dès lors qu’il y a dissensus. N’est-ce pas pourtant le contraire qui devrait faire le plus peur ? Quand c’est trop beau, c’est que ça paraît trop beau, c’est que tout est sous contrôle ou qu’un processus de séduction est à l'œuvre. La séduction n’est pas un processus qui se fait dans l’intérêt de l’autre.
- Les désaccords sont normaux et sains. Nous n’avons pas les mêmes idéologies (synonymes : récit, fable, culture, pratiques, vécu,... qui expliquent le monde). Nos idéologies sont toujours fausses, ce sont des interprétations du monde. Et certaines idéologies s’affrontent car elles donnent des privilèges aux uns plutôt qu’aux autres une fois que leurs principes se retrouvent dans la loi. Certaines sont tolérantes permettent aux autres d’exister, elles sont inclusives. Certaines sont agressives, uniformisantes et intolérantes. Les personnes qui ne perçoivent pas le monde comme nous génèrent des peurs et le sentiment d’être en danger ce qui peut rendre une discussion houleuse.
- Complémentaire de ce qui précède : chacun.e pense ce qu’iel veut mais toutes les pensées ne se valent pas, parce que le relativisme absolu conduit à une impasse intellectuelle majeure, on ne pourrait plus distinguer ce qui est bon ou mauvais, cela dépendrait de chacun.e et par exemple, les crimes seraient laissés à l’appréciation de chacun.e. Il y a des pensées prédatrices et excluantes. il y a des pensées émancipatrices et inclusives. Il y a des pensées sourcées et des pensées non sourcées. Il y a des pensées étayées et des pensées automatiques. Il y a des pensées qui tentent d’éliminer les biais cognitifs et des pensées qui en sont l’unique reflet,. Etc.
- Théorie et expérience concrète : l’une ne va pas sans l’autre. Elles sont souvent opposées. Toute pensée s’inscrit dans un cadre théorique, idéologique, qu’il soit conscient ou non. Par contre on peut analyser une bonne et une mauvaise théorie. Une bonne théorie inclut votre expérience concrète mais aussi celle de toutes les personnes ou d’un maximum de personnes. Si en revanche votre théorie ne permet d’expliquer que votre vécu ou que ce que vous avez l’habitude de voir du réel alors elle risque fort d’être mise à mal par le vécu d’autres personnes.
- Nous n’avons pas de nécessité humaine à être efficace, productif, polyvalent, flexible ou obtenir des résultats tout le temps. C’est la culture de la prédation qui nous pousse à ces comportements. Dans une société humaine décente, le soin est ainsi prioritaire sur le résultat.
Autogestion :
- Faire ce qu’il reste à faire ; il reste toujours des choses à faire, à commencer par observer ET interagir
- Quand je commence à être saoulé de quelque chose, c’est le moment de m’activer pour agir ou de demander à quelqu’un.e de m’aider à agir ; ou de poser un sujet sur la table ; ou je comprends qu’il n’y a pas d’énergie bénévole pour ce faire et je lâche prise ; etc.
- Les attentes irrationnelles vis-à-vis des autres génèrent de la frustration. Se demander si les attentes que l’on a sont méritocratiques (les autres devraient faire comme moi, autant que moi, se bouger, ne sont-iels pas en train de profiter ?)
- La responsabilité sans pression : personne n’est obligé.e de rien ; ça n’empêche pas que chacun.e ait une part de responsabilité dans le dynamisme du groupe, des réunions, l’avancée des projets…Si personne ne fait rien il ne se passe rien non plus. Si tout le monde fait qq chose alors l’asso est florissante.
- Chacun.e est amené à se libérer des injonctions collectives, et cela fonctionne beaucoup mieux quand les participant.es se sentent concerné.es, dominants comme dominés, sans se sentir mis en cause personnellement.
Forum ouvert :
Le forum ouvert vient répondre à au moins 3 enjeux : il est d’autant plus pertinent dès lors que l’on dépasse un certain nombre de personnes qui s’organisent ; il prend soin de la réalité de chacune, de la diversité ; il permet d’avancer sur plusieurs sujets en même temps. Inconvénient potentiel : ne pas perdre de vue la vision d’ensemble de ce qui se produit au fil du temps.
Il est organisé entre les membres actifs différents espaces-temps au cours de la session (ex : un we BdP). Chaque espace étant découpé en tranches de temps et chaque temps pouvant occuper différents espaces. Chaque membre émet ensuite des propositions d’activité dans un temps et un espace donnés. Un savant mélange de responsabilité et d’envies individuelles va ensuite opérer une organisation en sous-groupes sachant qu’une plénière est tout à fait possible dans ce cadre.
Comment fonctionne un forum ouvert ?
- Ca commence par défaut à l’heure déterminée lors de la proposition ou lorsque ça commence pour x ou y raison, les personnes arrivent quand elles arrivent et repartent idem
- Ca termine quand ça termine
- Les personnes présentes sont les bonnes personnes, peu importe le niveau, celleux qui ont le meilleur niveau ayant le devoir d’accompagner les autres.
- Règle des 2 pieds : si je sens que j’apprends rien et que j’apporte rien, je peux me mettre sur mes 2 pieds et aller ailleurs. On a le droit de prendre une pause, d’aller réfléchir dans son coin et de se poser dans un groupe sans rien dire ou de butiner d’un groupe à l’autre.
- Ce qui arrive arrive : privilégier le vécu sur le prévu.
Comment dire et recevoir dans une discussion qui vise à mettre sincèrement des sujets sur la table ? (tiré de la discussion sur les non-dits)
- Ce ne sont pas tant les personnes qui sont toxiques que les structures (règles, injonctions, normes) qui les font dysfonctionner. Déceler, identifier ces structures, injonctions et normes permet de comprendre ce qui se passe au niveau individuel.
- Chacun.e est responsable de sa parole.
- Toute émotion est réelle, l’interprétation qui en découle pas forcément.
- Toute émotion a le droit de s’exprimer, sous la forme qu’elle prend
- J’évite d’interpréter le ressenti des autres.
- Je m’assure que mon interlocuteur.ice est disponible pour recevoir un reproche.
- J’évite les digressions ou les discours qui tournent en boucle et je me sens légitime de l’exprimer lorsque je me sens dans cette situation.
- Je pars du principe que chacun.e fait son maximum. Personne ne veut nuire ni me nuire. Tout le monde veut se sentir mieux.
- Le collectif s’efforce de reformuler les propos pour éviter les biais de compréhension. Des rôles peuvent être attribués (particulièrement les demandes / expressions des besoins)
- Je respecte la confidentialité des échanges avec les personnes présentes
- Il est préférable de rester vigilant lorsque l’on nomme des absents. Veiller dans ce cas à rester hyper factuel.
- Idem sur des situations qui m’ont été rapportées par d’autres personnes.
Optionnel :
- Ce qui se passe dans certains ateliers ou sessions peut demander à rester confidentiel